Dans les entrailles de notre Région, ne se cache pas seulement l’or noir qui a fait la richesse industrielle de la France pendant plusieurs décennies, mais également une innovation touristique majeure : le Centre Historique Minier de Lewarde, situé dans le Département du Nord, utilise l’intelligence artificielle pour préserver la mémoire des mineurs et enrichir l’expérience des visiteurs. Découvrez comment ce musée, classé parmi les plus visités de la région, allie technologie moderne et témoignage du passé industriel pour créer une expérience unique.
Un lieu emblématique du patrimoine minier
Installé dans une ancienne fosse minière en activité pendant 40 ans, le Centre Historique Minier (CHM) retrace 300 ans d’histoire industrielle à travers des expositions et un parcours scénique immersif. Avec plus de 180 000 visiteurs par an, il attire un public varié : scolaires, locaux et touristes internationaux, ce qui en fait le 5ème musée le plus visité des Hauts-de-France !

Jusqu’en 2010, ces centaines de milliers de visiteurs étaient guidées par d’anciens mineurs, offrant des récits passionnés et des anecdotes uniques : certaines visites pouvaient même durer jusque 3 heures ! Cependant, l’attente du public évoluant et les anciens mineurs partant progressivement à la retraite, le CHM avait déjà entamer la mue de sa médiation culturelle.
Repenser la visite
Le premier changement significatif s’est opéré lorsque le musée a commencé à faire appel à des médiateurs culturels externes. Ces derniers apportaient une autre dimension aux visites grâce à leur formation : certains médiateurs étaient plus spécialisés sur la géologie tandis que d’autres plus spécialistes des questions sociales et sociétales de l’époque minière. Par ailleurs, un moment « rencontre » de 30 minutes était maintenu en fin de visite, puisque le visiteur pouvait poser ses questions à un véritable ancien mineur juste avant de terminer le parcours.
Néanmoins, ce nouveau format de visite ne pouvait pas répondre fondamentalement à la question du vieillissement des mineurs ainsi qu’à la potentielle disparition de leur précieux témoignage. Les équipes du musée se sont posées la question de la conservation de ces récits afin de garder une trace
vivante de ce qui s’est réellement passé dans ces mines. De plus, le moment de l’échange entre le mineur et les visiteurs était cruciale : quelle solution peut donc à la fois permettre de conserver dans le temps des témoignages vivants – sans la personne vivante – tout en instaurant un dialogue naturel avec le visiteur ?
La rencontre avec Hovertone
Pour répondre à ce défi, le musée s’est associé à Hovertone, une entreprise belge spécialisée dans les expériences interactives. Leur mission : imaginer le dispositif capable de faire honneur aux témoignages des mineurs et d’enrichir l’expérience du visiteur au sein du musée.
Hovertone
Crée en 2015 à Mons par Nicolas d’Alessandro et Joëlle Tilmanne, Hovertone est une entreprise belge spécialisée dans le design d’expériences interactives grâce aux technologies innovantes en mettant au coeur de leur process l’expérience visiteur. Fresque numérique interactive, dispositif artistique, bornes, installations itinérantes : leur approche pluridisciplinaire et protéiforme leur permet de créer des dispositifs marquants pour le visiteur. Ils ont notamment accompagné Pairi Daiza, le Grimaldi Forum de Monaco, ou encore la Maison de la Grenouillère, dans le marais Poitevin.
Un dialogue immersif grâce à l’IA
Le principe de la solution est simple : le visiteur écrit ce qu’il veut comme question à poser, et une intelligence artificielle va ensuite aller rapprocher cette requête par rapport à une base de données de témoignages existante pour aller donner la réponse la plus appropriée. Une vidéo se lance alors d’un mineur parlant face caméra et qui témoigne auprès du visiteur qui lui a posé la question.
Karine Sprimont, directrice de la communication et du développement du Centre Historique Minier de Lewarde, témoigne des coulisses de la création de cette innovation technologique : « Nous avons décidé d’enregistrer nos 3 derniers anciens mineurs encore sur le site – avant leur départ à la retraite – grâce à une grille de plus de 150 questions » détaille-t-elle. Ces questions ont été élaborées à partir de celles déjà posées par les visiteurs mais aussi à partir de tous les éléments qui pouvaient être liés à la mine. « Aucune de leur réponse n’a été guidée par le musée, on voulait que ce soit le plus naturel possible, comme dans un réel échange. » détaille Karine Sprimont.
Les coulisses des enregistrements
Nicolas d’Alessandro, co-fondateur de Hovertone, ajoute également qu’« avant même de parler de l’IA, nous souhaitions d’abord créer une archive documentaire de grande qualité, c’était surtout ça le but premier. » Au total, ce sont plus de 60 heures de séquences d’interview enregistrées dans un cadre de grande qualité par un studio professionnel. « L’outil technologique – qu’est l’IA – vient juste aider à la médiation mais on voulait d’abord créer une archive » détaille Nicolas.
« On a donc utilisé l’IA et de la transformer pour donner l’illusion qu’on échange et qu’on dialogue avec un ancien mineur mais l’extrait utilisé est authentique et non-transformé »
Nicolas d’Alessandro, co-fondateur de Hovertone
Au niveau du dispositif technique, la contrainte a été celle de réduire la distance entre le visiteur et le dispositif numérique et ne pas tomber dans le piège du « chatbot » ou avec des « deep fakes ». « Au-delà de l’obsolescence technologique que ces technologies peuvent représenter, éthiquement, nous n’étions pas à l’aise avec le fait de créer des dialogues inventés ou extrapolés » raconte Nicolas d’Hovertone. Au final, la solution a été de créer « l’illusion d’un dialogue » en faisant en sorte que les réponses du mineur ne soient pas modifiées par l’IA.
Une innovation enrichie et plébiscitée

À ce jour, aucune question n’est restée sans réponse. « Nos visiteurs ont très bien accueilli ce dispositif qui ne dénature pas la visite et qui ajoute une émotion, malgré le fait que le mineur ne soit plus présent physiquement » détaille Karine Sprimont. Le musée est déjà actif sur les possibles améliorations de cette innovation : ajouter des nouvelles réponses, travailler l’emplacement du dispositif pour le rendre plus immersif, un accès en langues étrangères ou encore ajouter d’autres témoins (femme, enfant).
Par ailleurs, le projet a également été récompensé par les professionnels de la filière culture et de la filière tourisme. En mars 2025, il avait remporté le « Grand Prix Innovation Numérique » lors du SITEM et en novembre 2025, le prix « Travel Tech » lors de la cérémonie des Talents de l’Innovation Touristique.
Cette étude de cas illustre comment l’innovation technologique peut servir la préservation du patrimoine et l’enrichissement de l’expérience touristique. En combinant authenticité et interactivité, le Centre Historique Minier de Lewarde montre que l’IA peut être un outil pertinent pour rendre l’histoire vivante et accessible à tous.
Les partenaires du projet

Soutien financier et accompagnement dans le cadre de l’appel à projets «Applications et dispositifs numériques innovants (ADNI) ».

Expertise en médiation culturelle et numérique.

Appui scientifique et historique pour garantir la fidélité des témoignages.
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